Cepanorama ne se trouve pas naturellement dans Horizon Forbidden West puisqu’il faut avoir trouvĂ© les 8 autres pour le dĂ©bloquer. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y aura pas besoin de le chercher puisqu’on obtient automatiquement la quĂȘte et son emplacement en terminant le huitiĂšme panorama.
Dans Horizon Forbidden West, vous allez pouvoir accĂ©der Ă  des activitĂ©s secondaires dont les panoramas. On vous indique oĂč les trouver et les complĂ©ter. Horizon Forbidden West est enfin disponible sur PS4 et PS5 et comme dans le premier opus, vous allez pouvoir accĂ©der Ă  de nombreuses activitĂ©s ces objectifs annexes, on en retrouve un qui concerne les panoramas et qui consiste Ă  reconstituer une image avec l'aide de notre focus. Pour les dĂ©clencher, il vous suffit de vous approcher des tours qui sont reprĂ©sentĂ©es par une icĂŽne d'Ɠil sur votre carte. À lire aussi Comment complĂ©ter les panoramas dans Horizon Forbidden West ?Si vous cherchez Ă  savoir oĂč se situe tous les panoramas et la solution pour les rĂ©soudre, eh bien, vous pouvez consulter notre tableau rĂ©capitulatif ci-dessous. Nous vous rappelons au passage que pour complĂ©ter cette activitĂ©, il vous faudra superposer l'image donnĂ©e par votre focus sur le dĂ©cor aux alentours afin de reconstituer une vision du passĂ©. Une fois que vous en aurez complĂ©tĂ© un, l'icĂŽne d'Ɠil reprĂ©sentant ces panoramas sera colorĂ© en vert signifiant que l'activitĂ© a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e. Il est Ă  noter que la solution est basĂ©e sur la vidĂ©o de Trophygamers. Panorama Emplacement Solution 1 Les Couards VidĂ©o 2 Le Bosquet de la mĂ©moire VidĂ©o 3 La longue cĂŽte VidĂ©o 4 MĂ©lopĂ©e VidĂ©o 5 Des hauteurs nimbĂ©es de brume VidĂ©o 6 Les Morisables VidĂ©o 7 Lance Ardente VidĂ©o 8 Cavidune VidĂ©o 9 Île aux aiguilles VidĂ©o Enfin, n'oubliez pas que chaque panorama que vous avez reconstituĂ© vous rapportera 1 500 points d'expĂ©rience et qu'une fois les neufs panoramas finis, vous devrez aller collecter une rĂ©compense qui s'affichera sur votre carte.

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Resumo Índice Mapa Texto Bibliografia Nota de fim Citação Autor Resumo Suite Ă  un travail de terrain entre 1995 et 2015, dans un village de riziculteurs du Sud-Ouest de la Chine, en tant qu’artiste-chercheuse, j’examine dans ce texte les profondes mutations qui traversent les territoires frontaliers ruraux habitĂ©s par les minoritĂ©s nationales non-Han et en particulier ceux des Hani de la vallĂ©e du fleuve Rouge au Yunnan. Quel devenir pour leur modĂšle ancestral de riziculture irriguĂ©e en terrasse et quels sont les enjeux auxquels ils font face ? Mon travail croise une approche sensible par la photographie, le paysage peint, jusqu’aux Ɠuvres des artistes chinois de l’art contemporain, et examine les politiques patrimoniales d’amĂ©nagement du paysage. Les enjeux de la prĂ©servation ne sont pas seulement environnementaux - biodiversitĂ©, dĂ©veloppement durable, ils sont identitaires - cultures vernaculaires et minoritaires. J’en pointerai les limites et esquisserai le da pĂĄgina Entradas no Ă­ndice Topo da pĂĄgina Texto integral PrĂ©ambule 1 L'appropriation culturelle se manifeste lorsqu’un groupe dominant emprunte ou consomme des Ă©lĂ©ments ... 2 Enwezor dĂ©finit l’exposition Documenta 11 comme “a constellation of disciplinary models that seek t ... 3 Dans le cadre de cet article, il s'agit d'ethnies minoritaires d'une Province appartenant Ă  la RĂ©pu ... 1Le concept de paysage culturel » appliquĂ© Ă  des terres cultivĂ©es soulĂšve des questions – objectivation, patrimonialisation, marchandisation des territoires, du mĂȘme ordre que celles qui agitent le milieu de l’art en rapport avec l’altĂ©ritĂ© et Ă  certains de ses corolaires exotisation et appropriation culturelle1. Dans le contexte chinois, des paysages sont fabriquĂ©s ou maintenus », des corps sont formatĂ©s Yu, 2018 des fictions sont construites, et constituent de nouveaux imaginaires AugĂ©, 1997. L’art contemporain en particulier, depuis l’évĂ©nement artistique Documenta 11 dont le commissariat Ă©tait assurĂ© en 2002 par Okwui Enwezor, est traversĂ© par des questions inhĂ©rentes aux frictions global/local, et questionne les reprĂ©sentations qui en sont faites, dans une perspective postcoloniale2. L’artiste ne met pas seulement le monde en images, il questionne, bouscule les imaginaires, et son travail est source de rĂ©flexion. VoilĂ  pourquoi il m’a paru nĂ©cessaire, aprĂšs avoir dĂ©crit l’environnement culturel dont il est question – un village hani, de me pencher sur la consommation - au sens d’une anthropophagie scopique - de paysage et d’ethnicitĂ©, en Chine, et sur l’interprĂ©tation que fait l’art contemporain de ces phĂ©nomĂšnes3. 4 Sur l’emploi du je, Fabiana Ex-Souza 2020 5 Le titre Riken no ken, une expression du théùtre japonais, signifie le regard Ă©loignĂ© » m’a Ă©tĂ© i ... 6 “MinoritĂ© visible” signifie que, bien que française de naissance, j’ai Ă©tĂ© assignĂ©e Ă  une identitĂ© ... 7 Dans ethno-graphies, une conversation avec Martine Bouchier, publiĂ©e dans Afrikadaa, je cite George ... 2Toute crĂ©ation artistique porte sa subjectivitĂ© qui devient en quelque sorte le manifeste de l’artiste4. Le mien serait mon triptyque Riken no ken, portrait de trois femmes – je suis l’une d’entre elles, vĂȘtues du costume hani5. Il synthĂ©tise les questions qui sous-tendent mon travail d’artiste, d’architecte et de chercheuse, mon point de vue rendant compte Ă©galement de mon expĂ©rience de femme en position de minoritĂ© visible6 » en France, partageant un statut pĂ©riphĂ©rique, comparable, toutes proportions gardĂ©es, avec celui des Hani en Chine, Comme l’ethnologue Georges Condominas qui questionnait son dĂ©sir de s’intĂ©grer Ă  la culture des montagnards du Centre-Vietnam Ă  la lumiĂšre de ses propres origines française et portugo-sinovietnamienne, je cultive l’empathie7. 8 Je rends compte en dĂ©tail de ce processus et de la fonction du dessin, mĂ©dia qui permet une interac ... 3Comment apprĂ©hender les espaces cultivĂ©s des Hani, avec quels outils d’analyse ? Si, en 2020, le dĂ©centrement est de rigueur, en 1995 quand ma recherche a commencĂ© ce n’était pas d’actualitĂ©. Depuis, Philippe Descola a rĂ©flĂ©chi Par-delĂ  Nature et Culture Descola, 2005. Augustin Berque est revenu sur sa notion de sociĂ©tĂ© proto-paysagĂšre qui induisait une hiĂ©rarchie entre les civilisations Ă©voluĂ©es » qui produisent des reprĂ©sentations du paysage, et d’autres qui n’en ont pas Berque, 1998 ; 1994. Cependant, lorsque je partais en Chine pour une rĂ©sidence d’artiste Villa Medicis Hors les Murs » de six mois, en 1995, les principaux thĂ©oriciens français dĂ©crĂ©taient l’apparition du paysage Ă  la Renaissance, sur le fondement qu’il n’y a pas de paysage sans reprĂ©sentation, picturale, ou littĂ©raire », et ce, en Ă©tudiant essentiellement deux sociĂ©tĂ©s la sociĂ©tĂ© occidentale et celle de la Chine ancienne Berque, 1994. Ces grilles de lecture n’étaient pas opĂ©rantes chez les Hani du fleuve Rouge, sociĂ©tĂ© sans Ă©criture qui transmet une culture orale, de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration. Ceci m’a conduite Ă  m’écarter du cadre universitaire et de l’autoritĂ© scientifique pour adopter la subjectivitĂ© de la vision artistique, abandonnant ma thĂšse sur La culture du paysage, riziĂšres des Hani », pour mener ces recherches en suivant d’autres itinĂ©raires. Dans mon approche mĂ©thodologique, il n’y a pas d’entretiens dans le sens ethnographique du terme ; je suis hĂ©bergĂ©e comme le serait une lointaine parente chez la famille hani avec laquelle j’ai tissĂ© des liens affectifs. L’imitation, l’application d’une mĂ©thode sont l’antithĂšse de la dĂ©marche artistique. Cependant, si l’artiste ou l’architecte inventent une rĂ©ponse pour chaque contexte donnĂ©, produisent archives et matĂ©riaux visuels in situ dessin, photographie, relevĂ©, vidĂ©o, il serait rĂ©ducteur de rapprocher la vision de l’artiste de celle du bricoleur. Car si je procĂšde bien par assemblage, collage et analogie, je peux tout autant rĂ©pertorier des objets, esquisser une typologie de la maison hani, faire un inventaire des ouvrages de dĂ©rivation dans les riziĂšres, ou encore, retracer le catalogue des broderies du vĂȘtement fĂ©minin8. En rĂ©alisant ces motifs, les femmes hani ont attirĂ© mon attention lors de mes derniers sĂ©jours en 2005 et 2015, et cette rencontre avec leurs corps, leurs mains, leur mode d’expression visuelle a donnĂ© une autre orientation Ă  ma recherche, selon ce que RanciĂšre nomme play and encounter 2004. Hal Foster a qualifiĂ© de tournant ethnographique », dans un article paru en 1996, cette nouvelle fonction de l’art. A l’issue du premier sĂ©jour de 1995-1996, je prĂ©sentais la sĂ©rie de photographies en noir et blanc ÉlĂ©vation qui renverse le point de vue plongeant sur les riziĂšres en terrasses qui restent littĂ©ralement Ă  la surface » de ces Ă©tendues inondĂ©es. Je changeais alors de focale, proposant d’autres perspectives. Document n° 1 Document n° 1 Myriam Dao, Gravir I, sĂ©rie ElĂ©vation, 2003. Tirage numĂ©rique sur toile. Myriam Dao / ADAGP. Document n° 2 La rĂ©gion du Yunnan en Chine, 2019 RĂ©alisation de l’auteur. I. Le modĂšle Hani, Ă©cosystĂšme et paysage symbolique A. L’écosystĂšme des Hani du fleuve Rouge 4La province chinoise du Yunnan est traversĂ©e par trois grands fleuves qui se dĂ©versent ensuite via le continent asiatique, le MĂ©kong Lancang, le fleuve Bleu Yangzi Jiang, et le fleuve Rouge Hong He Document n° 2. Les riziculteurs hani de la vallĂ©e du fleuve Rouge pratiquent la riziculture sur terrasses irriguĂ©es, construites Ă  flanc de montagne, entre 800 m et 1800 m d’altitude dans la PrĂ©fecture Autonome Hani et Yi du Honghe, ceci sur prĂšs de hectares. Les Hani bĂątissent leurs villages Ă  proximitĂ© immĂ©diate de sources situĂ©es en amont, dans la forĂȘt. De ces sources, lieux sacralisĂ©s, partent des canaux, qui, en se ramifiant, irriguent l’ensemble des riziĂšres en terrasses bĂąties en aval du village. Document n° 3. Document n° 3 Myriam Dao, Le canal principal en amont du village, Yunnan, Chine, 1995, photographie argentique, Myriam Dao / ADAGP. 5Le rĂ©seau d’irrigation parcourt d’abord le village, se remplit au passage des dĂ©jections humaines et animales, et dĂ©pose cet engrais organique dans les canaux avant que ceux-ci acheminent l’eau dans les parcelles cultivĂ©es. Des systĂšmes de dĂ©rivations composĂ©s de pierres placĂ©es dans le canal secondaire d’irrigation, permettent de rĂ©partir l’eau dans toutes les ramifications du rĂ©seau. ParallĂšlement Ă  ce systĂšme d’approvisionnement en eau, des orifices de vidange permettent de rĂ©guler le volume d’eau dans chaque parcelle, ainsi que de les assĂ©cher temporairement Document n° 4. Document n° 4 RiziĂšres, 1995. Photographie argentique de l’auteur. Document n° 5 Coupe sur le village hani, Yunnan, Chine, 2015. Dessin Ă  l’encre de l’auteur. 6L’environnement des Hani ne repose pas uniquement sur la riziculture. La culture du riz partage l’espace avec d’autres productions agricoles qui apportent un complĂ©ment pour l’alimentation et contribuent Ă©galement Ă  un Ă©quilibre agraire Bouchery, 1999. Les parcelles cultivĂ©es Ă  la sortie basse du village fonctionnent comme des pĂ©piniĂšres, rĂ©coltent les dĂ©chets organiques vĂ©gĂ©taux, animaux et humains transformĂ©s en compost – fixateur d’azote – qui fertilisent les plants avant qu’ils ne soient repiquĂ©s en aval. C’est le principe de la permaculture. Les parcelles mises en eau sont le refuge des canards qui s’y alimentent tout en dĂ©barrassant la terre des insectes et autres animaux nuisibles. Dans les parcelles en aval, les Hani pratiquent la pisciculture et pĂȘchent Document n° 5. Cette forme de permaculture rassemble ainsi des espĂšces variĂ©es et se dĂ©veloppe en relation avec tout organisme vivant. L’homme, la nature, les animaux Ă©changent dans le mĂȘme monde Jiao Y., 2011 et 2014. B. Paysage symbolique du monde Hani 7Dans la mythologie hani, l’eau est Ă  l’origine de toutes choses, et d’aprĂšs Li Zi Xian, elle mentionne une vaste Ă©tendue d’eau rĂ©pandue sur terre. » De lĂ  vient l’origine du monde. Les animaux aquatiques qui peuplaient cet ocĂ©an créÚrent toutes les espĂšces humaines ». C’est probablement entre le VIIe et le Xe siĂšcle, sous la dynastie Tang que ce mythe a commencĂ© Ă  prendre forme dans l’imaginaire hani Bouchery, 1995. Un gigantesque poisson rouge femelle a créé les cieux, la terre, toute chose, dieux, hommes, graines. » Document n° 6. Document n° 6 Myriam Dao, Bararama, bijou cĂ©rĂ©moniel hani, Yunnan, Chine, 1995, photographie argentique Myriam Dao / ADAGP. 8L’eau est un bien partagĂ©. A travers une gestion de l’eau collective de la responsabilitĂ© de chacun, c’est une organisation sociale et, pour ainsi dire, vertueuse, qui s’exprime ici. Une terrasse irriguĂ©e en amont possĂšde un trop plein qui dĂ©bouche sur la riziĂšre situĂ©e en contrebas, et ainsi de suite. Chaque parcelle est une propriĂ©tĂ© individuelle appartenant Ă  une famille, mais l’eau qui y circule est partagĂ©e entre tous. Les parcelles ne sont pas seulement mitoyennes, elles partagent la mĂȘme eau suivant un rapport du haut vers le bas, de l’amont Ă  l’aval, de ce fait, hiĂ©rarchisĂ© dans l’espace. L’expression d’une relation communautaire forte est donc inscrite dans chaque parcelle suivant une imbrication complexe Bouchery, 2012. On peut affirmer que chez les Hani, la montagne cultivĂ©e est le lieu d’une sociabilitĂ© – il s’y dĂ©roule des fĂȘtes – et mĂȘme d’une socialitĂ©. 9Les Hani, une sociĂ©tĂ© idĂ©ale, ont-ils une cosmogonie des montagnes et eaux » ? 9 Traduction de Pascal Bouchery. 10 Bouchery, 2012, au sujet de la cosmogonie hani sa structure narrative prĂ©sente des affinitĂ©s av ... 11 Pour le lien entre la cosmogonie de la Chine antique et celle des Hani, cf. Bouchery 2010 et 2012. 10Le concept de beau paysage » ou paysage idĂ©al est dĂ©crit de la sorte par les Hani Xaota-xaotae xu-sa, uphu tsaodzae xu-sa », littĂ©ralement un environnement de montagnes oĂč l’eau s’écoule rapidement » Bouchery, 19959. La montagne et le cours d’eau, voilĂ  ce qui constitue pour les Hani un paysage idĂ©al. L’importance de ces deux Ă©lĂ©ments, la montagne et l’eau – prĂ©sents dans la pensĂ©e de la Chine taoĂŻste – ne doit pas minimiser celle d’un autre facteur l’écoulement rapide de l’eau, autrement dit, le mouvement. S’ils possĂšdent une culture propre Ă  leur territoire spĂ©cifique, les Hani du fleuve Rouge appartiennent cependant, gĂ©ographiquement, au monde chinois10. La vallĂ©e du Fleuve Rouge est une partie de la province du Yunnan. De ce fait, il me parait pertinent d’esquisser un parallĂšle entre le monde hani et le paysage taoĂŻste11. Document n° 7 Shi Tao, Cascade Mingxianquan et Mont Hutouyan, Qing Dynasty, 17e siĂšcle, encre et couleurs sur papier, Sen-oku Hakuko Kan Sumitomo Collection, Kyoto. C. Paysage taoĂŻste 12 Citation du peintre Zong Bing, IVe siĂšcle, Hurvitz L. 1970, "Tsung Ping's Comments on Landscape Pai ... 13 Citation de Mircea Eliade dans Le sacrĂ© et le profane, 1965. 11Les monts et les eaux sont les deux principaux motifs du paysage chinois, au point que ce qui les dĂ©signe en chinois shan shui, est devenu synonyme du genre pictural chinois paysage ». L’objet que se donne la peinture chinoise est de crĂ©er un microcosme, plus vrai que la Nature elle-mĂȘme »12. Si l’homme n’est pas figurativement reprĂ©sentĂ©, il n’est pas pour autant absent ; sa prĂ©sence au monde sous les traits de la nature, laquelle, vĂ©cue ou rĂȘvĂ©e par lui, n’est autre que la projection de sa propre nature profonde tout habitĂ©e d’une vision intĂ©rieure. Ainsi, peindre la Montagne et l’Eau, c’est faire le portrait de l’homme, et plus prĂ©cisĂ©ment, de la dynamique mĂȘme du corps humain Cheng, 1979. Ainsi les peintres taoĂŻstes Ă©tablissent une correspondance entre microcosme et macrocosme par le biais de la conception taoĂŻste du monde et des processus vitaux qui l’animent – les mĂ©ridiens. L’Homme est en symbiose avec le paysage, et c’est prĂ©cisĂ©ment cette harmonie qui doit ĂȘtre montrĂ©e par le peintre. Document n° 7 La Chine taoĂŻste ne connait pas la sĂ©paration entre monde physique et monde phĂ©nomĂ©nal, contrairement Ă  ce qui est apparu avec la ModernitĂ© en Occident. Toutefois, le mot shan shui dĂ©signe plutĂŽt la reprĂ©sentation, et non le rĂ©el. Il s’agit d’un paysage apprĂ©hendĂ© visuellement donc, voire un paysage mental, celui qui est parcouru par les poĂštes qui visitent en esprit ». L’Ɠuvre d’art nous entraĂźne dans un pĂ©riple visuel. Qu’en est-il aujourd’hui ? Loin, trĂšs loin de la conception taoĂŻste du paysage, l’amĂ©nagement du territoire en Chine rĂ©pond plus Ă  un mouvement de théùtralisation du paysage – dans l’esprit de la sociĂ©tĂ© du spectacle », qu’à un souci de placer l’homme en harmonie avec le cosmos. Mircea Eliade notait dĂ©jĂ  en 1965 ...Le Cosmos est devenu opaque, inerte, muet il ne transmet aucun message, n’est porteur d’aucun chiffre »13. II. Une famille de riziculteurs Hani / 1995-2015 14 Le nom de famille a Ă©tĂ© changĂ©. Mes hĂŽtes ne sont pas mes "informateurs" au sens de l'enquĂȘte ethno ... 12En 1995, c’est M. Ma14 nĂ© vers 1930, aujourd’hui arriĂšre-grand-pĂšre, qui m’a accueillie dans le village hani, oĂč je suis restĂ©e deux fois trois mois. Bien que je ne restitue aucun tĂ©moignage de villageois sur le sujet de l’amĂ©nagement touristique, j’ai choisi de ne pas citer le nom du village. M. Ma habitait la maison de briques cuites, rebĂątie avec l’aide des voisins, pour remplacer celle de ses parents en terre crue. BĂątie sur pilotis, l’espace au niveau au sol est dĂ©volu au buffle, seul l’étage est habitĂ© assorti d’un minuscule grenier au second niveau. Sans eau courante, elle est partiellement couverte de chaume, l’autre partie en terrasse est dĂ©diĂ©e au sĂ©chage des rĂ©coltes. 13En 1995, le fils de M. Ma, nĂ© vers 1950, la 2e gĂ©nĂ©ration - aujourd’hui le grand-pĂšre », travaille en ville Ă  l’usine. Parmi ses 4 enfants – la 3e gĂ©nĂ©ration nĂ©e dans les annĂ©es 1980, aujourd’hui les parents », les deux ainĂ©s sont scolarisĂ©s dans la capitale de la prĂ©fecture du Hong He fleuve Rouge, et les deux derniers, inscrits Ă  l’école du village, vivent avec leurs grands-parents qu’ils aident pour de menus travaux agricoles. Lors de ce premier sĂ©jour, mon travail se focalise sur les riziĂšres en terrasses, leur systĂšme d’irrigation, le lien Ă©troit entre le village bĂąti et son milieu. 14Lorsque je reviens en 2005 durant deux semaines pour me focaliser sur les motifs des vĂȘtements fĂ©minins, le fils de M. Ma a repris la maison familiale avec son Ă©pouse et exploite Ă  son tour les riziĂšres. M. Ma, retraitĂ©, s’est installĂ© dans la capitale de la prĂ©fecture, entourĂ©s de ses deux petites filles 3e gĂ©nĂ©ration que j’avais connues Ă©coliĂšres, Ă  leur tour mĂšres chacune d’un garçon appartenant Ă  la 4e gĂ©nĂ©ration les arriĂšre-petits-enfants. C’est au cours de ce second sĂ©jour que je peux Ă©tablir un lien entre les broderies du vĂȘtement fĂ©minin et les tracĂ©s des riziĂšres. Des volutes, courbes et contrecourbes brodĂ©es sur les vĂȘtements ancestraux, sont aujourd’hui encore portĂ©s par les jeunes filles et les femmes hani, mais dans une version manufacturĂ©e. A noter que les voyagistes ont compris l’argument commercial et proposent des formules de sĂ©jour dans les vallĂ©es du fleuve Rouge, illustrĂ©es dans les brochures pour moitiĂ© par des portraits de femmes en costume ethnique colorĂ©, et pour l’autre moitiĂ© par les riziĂšres en terrasses cf. infra, IndigĂ©nisation du paysage. Ils dĂ©crivent les nationalitĂ©s minoritaires ć°‘æ•°æ°‘æ—, shǎoshĂč mĂ­nzĂș comme une mosaĂŻque humaine », et les riziĂšres comme un patchwork miroitant ». La mĂ©taphore paysagĂšre et textile est Ă  son apogĂ©e dans la vallĂ©e du fleuve Rouge ! 15En 2015 je retourne au village pour une durĂ©e de trois semaines. Les deux sƓurs de la 3e gĂ©nĂ©ration travaillent en ville dans le commerce. Les migrations rural-urbain en Chine se sont gĂ©nĂ©ralisĂ©es dans les derniĂšres dĂ©cennies, dues aux disparitĂ©s Ă©conomiques ville/campagne, et leurs effets sociologiques ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s Kleinwechter, 2012. C’est le cas prĂ©cis de leurs deux frĂšres qui ont dĂ» migrer dans un pĂ©rimĂštre plus lointain, Ă  Kunming, dans la capitale de la province du Yunnan, Ă  une journĂ©e de route, pour travailler dans l’industrie, laissant leurs enfants au soin de leurs grands-parents. Ces derniers exploitent toujours les riziĂšres, bien qu’ils me disent avoir atteint l’ñge lĂ©gal de la retraite 60 ans pour un homme, 50 ans pour l’épouse d’un agriculteur, toujours selon eux. GrĂące Ă  l’argent gagnĂ© en ville par leurs enfants, les grands-parents ont pu reconstruire entiĂšrement leur maison. Document n° 8 Toitures et panneaux solaires du village hani, Yunnan, Chine, 2015. Photographie numĂ©rique de l’auteur. 15 Ces savoirs, en particulier la trĂšs riche pharmacopĂ©e relevĂ©e par Bouchery 1999, subissent une fo ... 16La nouvelle structure poteau-poutre en bĂ©ton avec des murs de briques, permet d’augmenter largement la surface bĂątie sur la parcelle, et de doubler la hauteur totale. L’eau courante, chauffĂ©e par un panneau photovoltaĂŻque en toiture, est installĂ©e comme dans la plupart des nouvelles maisons hani. Le changement de mode de vie est manifeste. Ce qui me frappe lors de ce sĂ©jour de 2015, c’est la transformation du village. Toutes les maisons agrandies rĂ©cemment ont empiĂ©tĂ© sur l’espace public, rĂ©duit Ă  sa plus simple expression. Le progrĂšs est arrivĂ©, mais le systĂšme hani est inchangĂ©. De ce fait, les eaux usĂ©es de vaisselle, et des lave-linges, qui circulent toujours d’amont en aval, alimentent en eau polluĂ©e de dĂ©tergent, les riziĂšres en aval. Le mĂ©decin vient au village, Ă  domicile, administrer une injection intraveineuse d’antibiotique Ă  la grand-mĂšre pour soigner un rhume. Cette mĂȘme personne m’avait prodiguĂ© des soins vingt ans plus tĂŽt, frottant des herbes et le dos d’une cuillĂšre sur mon cou et ma nuque pour me guĂ©rir d’une fiĂšvre15. 17Je me demande si les arriĂšre-petits-enfants reprendront la riziculture. Je crains qu’à mon prochain voyage, en 2025, la riziculture du village hani ne soit plus qu’un beau tapis de couleurs changeantes au rythme des saisons, entretenues par les habitants les plus dĂ©munis pour le plaisir des touristes. Ceux qui auront su prendre le tournant, et les arriĂšre-petits-enfants de M. Ma seront sans doute de ceux-lĂ , auront ouvert des chambres d’hĂŽtes dans leur maison agrandie, et le rooftop qui servait jusqu’à prĂ©sent au sĂ©chage des rĂ©coltes accueillera des bagpackers attablĂ©s devant leurs sodas. Document n° 9 Myriam Dao, Village hani dans un monde global, Yunnan, Chine, 2015, photographie numĂ©rique. Myriam Dao / ADAGP. III. Mutations A. Nouveaux flux Ă  travers le territoire 18Les territoires de la vallĂ©e du fleuve Rouge Ă©taient restĂ©s, jusqu’à la fin des annĂ©es 1990, difficiles d’accĂšs, pĂ©riphĂ©riques et non peuplĂ©s par l’ethnie majoritaire Han. Auparavant situĂ©es aux confins, ces rĂ©gions appartiennent aujourd’hui Ă  un espace gĂ©opolitique de premiĂšre importance au contact de quatre pays – la Birmanie, le Laos, le Vietnam, et la ThaĂŻlande, dont les trois premiers directement depuis l’ouverture des frontiĂšres communes. La Chine a normalisĂ© progressivement ses relations avec l’ASEAN et depuis 2010 s’instaure entre eux la plus vaste zone de libre-Ă©change du monde. Ce phĂ©nomĂšne se dĂ©veloppera dans les prochaines annĂ©es avec la construction des nouvelles routes de la Soie du 21e siĂšcle ». La province du Yunnan y sera Ă  la convergence du corridor Chine-Birmanie-Bangladesh et du corridor Chine-PĂ©ninsule indochinoise-Malaisie-IndonĂ©sie. 16 La politique de Beijing dont les deux premiĂšres phases – la construction d’un cadre institutionnel ... 19L’amĂ©lioration des rĂ©seaux de transports dans la vallĂ©e dans le cadre de la politique centrale16 – depuis 2005 le village hani est accessible depuis une autoroute, a prĂ©cipitĂ© une rupture symbolique en coupant le village de son entitĂ© complĂ©mentaire montagne-forĂȘt-source ». Cette autoroute facilite le commerce – les paysans vont vendre leurs denrĂ©es et acheter des marchandises industrialisĂ©es, mais le cercle vertueux » de l’écosystĂšme hani est rompu dĂšs lors que les habitants modifient leurs habitudes de consommation, modes de vie et standards. ImmĂ©diatement perceptible dans les changements architecturaux, vestimentaires et alimentaires, l’impact est tout aussi important au niveau de l’écologie Document n° 9. Cette ouverture vers un monde globalisĂ© se rĂ©percute sur le paysage, et aussi sur les structures de la culture immatĂ©rielle qui le sous-tendent Xin, 2000 du fait d’une forte sinisation » les langues minoritaires se perdent, jusqu’aux noms hani qui ne sont plus transmis, dans la famille Ma comme dans d’autres familles du village. L’épopĂ©e hani Ă©tait pourtant basĂ©e sur un rĂ©cit gĂ©nĂ©alogique. B. Le Théùtre de gĂ©ographie 17 Les seules reprĂ©sentations de riziĂšres sont issues du TraitĂ© de 1637 Tiangong Kaiwu 怩淄開物, L’Exp ... 18 20ConsĂ©quence directe de la nouvelle voie de circulation, les riziĂšres en terrasses intĂšgrent les circuits touristiques massivement. Des photographes viennent dans un premier temps de toute la Chine, puis, du monde entier. Ils s’attachent Ă  donner une image trĂšs picturale » ou pittoresque » du paysage des Hani du fleuve Rouge, vision aussitĂŽt vĂ©hiculĂ©e par les opĂ©rateurs touristiques. Les photographes chinois ont artialisĂ© les riziĂšres en terrasses – pour emprunter cette expression Ă  Alain Roger 1997 – c’est-Ă -dire qu’ils ont fait de ces champs cultivĂ©s en terrasses un objet digne de la reprĂ©sentation artistique – car il faut noter l’absence de ce motif dans la peinture classique chinoise17. Empruntant les codes de ce genre pictural, les photographes ont mis l’accent sur une esthĂ©tique nimbĂ©es de nuages18. PostĂ©s des heures durant au sommet des vallĂ©es, ils attendent le moment oĂč la brume enveloppe les parcelles inondĂ©es. Un nouveau motif pictural est fabriquĂ© celui qui met en scĂšne des riziĂšres inondĂ©es, Ă©tincelantes sous la lumiĂšre, avec des variations colorĂ©es suivant la position du soleil, des saisons, mais avec une constante une reprĂ©sentation en vue plongeante. Les riziĂšres deviennent iconiques. Seules les parcelles inondĂ©es ont la faveur des photographes. Mais ce n’est pas le concept de flux nourricier ou cosmique qui les attire. La prĂ©sence de l’eau ne vaut, pour leurs images, que parce qu’elle permet un jeu de miroir avec le ciel. 19 Op. citĂ© 20 La famille Ma s’est sĂ©parĂ©e de ce bijou de cĂ©rĂ©monie, et j’en ai retrouvĂ© une photographie dans un ... 21Pourtant, la peinture chinoise des montagnes et des eaux, selon Philippe Descola19 n’est aucunement une mise en art ou une artificialisation d’un environnement naturel, mais la mise en image d’une correspondance entre l’homme et le cosmos qui donne Ă  voir ce qui, dans le monde, entre en consonance avec les dispositions humaines. 
, il s’agit toujours d’un “monde en petit”, pour reprendre l’expression de Rolf Stein, 
 qui reproduit le grand monde au sein duquel l’homme peut Ă  la fois tisser des affinitĂ©s et trouver un refuge ». Cette citation fait Ă©cho Ă  la miniaturisation cosmogonique hani, existant au travers du bararama20, bijou de cĂ©rĂ©monie qui synthĂ©tise les correspondances Ă©tablies par les Hani cf. supra Document n° 6, Bararama, bijou cĂ©rĂ©moniel hani. 22Les photographes font abstraction du milieu, de l’écoumĂšne, tout comme le regard moderne s’est distanciĂ© du monde. 23Le tourisme de masse nĂ©cessite des amĂ©nagements panoramiques sur le paysage, et des observation deck, sont amĂ©nagĂ©s. Comme François Jullien je pose la question Est-ce seulement par la vue que l’on peut accĂ©der au paysage ? » Pour lui en effet, le paysage est non seulement affaire de vue, mais aussi de vivre » Jullien, 2014. En rĂ©ponse au besoin de contemplation, le paysage hani est mis en scĂšne. Des paysages dignes de scĂšne de théùtre » ou dĂ©cor. John Brinckerhoff Jackson, dans son article Landscape as Theater », notait le rapprochement entre scĂšne de théùtre et paysage, qui opĂ©rait dĂšs le 16e siĂšcle Brinckerhoff, 1979. L’anglais rend mieux la comparaison avec le mot scenery. Ainsi au Yunnan, on visite les terraced fields scenery et non seulement les riziĂšres, mais les habitants eux-mĂȘmes ! C. IndigĂ©nisation du paysage 21 ć°‘æ•°æ°‘æ—, shǎoshĂč mĂ­nzĂș, nationalitĂ©s minoritaires, le nombre 56 fut contestĂ© en 1953 avant d’ĂȘtre offi ... 24Les rĂ©gions situĂ©es aux marges sud et ouest de la Chine, sont celles qui abritent la plus forte population n’appartenant pas Ă  la nationalitĂ© majoritaire Han. Ainsi, la province du Yunnan, concentre Ă  elle-seule 25 ethnies – sur les 56 minoritĂ©s nationales ou ethnies minoritaires officiellement rĂ©pertoriĂ©es par la RĂ©publique populaire de Chine, dont les populations Hani, Tai, Miao, Yi, qui vivent imbriquĂ©es les unes avec les autres21. Ces ethnies qui vivent au-delĂ  des frontiĂšres chinoises en Birmanie, au Laos, au Vietnam, et en ThaĂŻlande, dĂ©finissent elles-mĂȘmes leur appartenance avec un certain flou, tant par rapport Ă  un territoire physique, qu’à une identitĂ© nationale. 22 Yu L., “Packaging Craftwork, Sharing Heritage Collaborative Brand Promotion in Multiethnic Southwe ... 25Source d’inspiration dans les toutes les sphĂšres de la sociĂ©tĂ© chinoise, le retour Ă  la tradition est happĂ© par le marketing qui en fait un argument de poids, jusqu’à la caricature Liu, 2019. Le tourisme culturel et patrimonial chinois joue donc sur plusieurs facteurs la mise en scĂšne du paysage, et celle des cultures ethniques Milan, 2012, et propose donc un pĂ©riple dans les villages de la vallĂ©e du fleuve Rouge, packaging » combinant ethnies minoritaires aux tenues colorĂ©es et riziĂšres en terrasses22. Document n° 10 Myriam Dao, Maison Mogu » du village hani, Yunnan, Chine, 1995. Photographie argentique. Myriam Dao / ADAGP. 26A la propagande historique sur les ethnies minoritaires hĂ©ritĂ©e des Ă©coles de sciences sociales marxistes chinoises Wu, 2015 et Guo, 2019, vient s’ajouter l’appĂ©tence de l’industrie touristique pour le storytelling. C’est ainsi que la lĂ©gende entourant les maisons champignons » hani a Ă©tĂ© idĂ©alisĂ©e le mont Re Luo est rouge et vert, les champignons poussent partout. Le petit champignon ne craint ni le vent ni la pluie, d’une belle apparence inoubliable. » Rongxing, 2018 Document n° 10. Le mythe d’une maison bioclimatique hani chaude en hiver et fraiche durant l’étĂ©, ventilĂ©e et sĂšche » Gao, 2013, conforte ainsi le choix des promoteurs immobiliers qui n’hĂ©sitent pas Ă  faire du style maison champignon » un argument de ventes des maisons sur pilotis de leurs villages de vacances Document n° 11. Document n° 11 Village de vacances de style hani, Yunnan, Chine, 2015. Photographie numĂ©rique de l’auteur. 23 InvitĂ© au Symposium qui s’est tenu le 12 mars 2016 en marge de l’exposition Bentu, par Philip Tinar ... 27A travers cette stratĂ©gie marketing de l’industrie touristique, on frĂŽle ce que dĂ©nonçait l’artiste chinois Qiu Zhijie, invitĂ© Ă  s’exprimer Ă  la fondation Louis Vuitton en 2016, Ă  savoir, l’exploitation superficielle des stĂ©rĂ©otypes de la tradition »23. Il explique un usage qui exploite l’apparence de la tradition sans chercher, ni Ă  la comprendre ou Ă  l’approfondir, ni Ă  la dĂ©construire ou la faire Ă©voluer. D. Patrimonialisation du paysage culturel » 24 Paysage culturel des riziĂšres en terrasse des Hani de Honghe 28L’annĂ©e 2013 marque plus encore le tournant patrimonial pour la vallĂ©e du fleuve Rouge le paysage des Hani devient un objet » inscrit sur les listes du Patrimoine Mondial de l’Unesco24, au titre de paysage culturel, c’est-Ă -dire que l’ensemble de son Ă©coumĂšne est reconnu comme devant ĂȘtre prĂ©servĂ©, avec toute l’organisation sociale, religieuse et Ă©cologique dont il dĂ©coule. D’aprĂšs l’Unesco, les paysages culturels sont des ƒuvres mĂȘlant la nature et l’empreinte qu’y a laissĂ©e l’ĂȘtre humain, les paysages culturels expriment la longue et intime relation des peuples avec leur environnement ». Le gouvernement chinois est tenu de mettre en Ɠuvre des mesures de protection et de mises en valeur. A premiĂšre vue, ces mesures devraient bĂ©nĂ©ficier aux villages et Ă  leurs populations, Ă  moins que le vernaculaire ne soit instrumentalisĂ©, Ă©tant entendu qu’en Chine, il ne peut ĂȘtre question d’enjeu identitaire. L’indigĂ©nĂ©itĂ©, si elle est reconnue comme culturelle, n’est en aucun cas une indigĂ©nĂ©itĂ© politique, il n’y a pas de peuples autochtones » en Chine. IV. Vers de nouveaux paradigmes 25 Site de l’Agence française de dĂ©veloppement ... 29La civilisation Ă©cologique » du gouvernement chinois les enjeux du programme L’écologie, la lutte contre la pollution et le dĂ©rĂšglement climatique, la prĂ©servation de la biodiversitĂ©, sont aujourd’hui des sujets de prĂ©occupation centraux pour les autoritĂ©s chinoises », selon le Guide mĂ©thodologique de l’agence française de dĂ©veloppement, AFD de PĂ©kin25. CrĂ©er les conditions d’une civilisation Ă©cologique » est un mot d’ordre du prĂ©sident Xi Jinping. La Chine est ainsi devenue en 2016 le premier producteur mondial d’énergie renouvelable selon l’Agence internationale de l’énergie. Par ailleurs, son gouvernement veut combler les inĂ©galitĂ©s Ville/Campagne en prĂŽnant le dĂ©veloppement Ă©conomique du monde rural. C’est ici que le tourisme, en particulier l’éco-tourisme, joue un rĂŽle de premier plan. 30Ces trois facteurs – transition Ă©cologique, dĂ©veloppement Ă©conomique, inscription patrimoniale du paysage culturel, dans le contexte des paysages de riziĂšres de la vallĂ©e du fleuve Rouge, convergent tout naturellement vers la crĂ©ation d’espaces protĂ©gĂ©s. Afin d’éviter l’arbitraire d’une politique verticale, plusieurs Ă©tapes devront ĂȘtre regardĂ©es avec attention la concordance des caractĂšres locaux avec les critĂšres listĂ©s par les experts et la labellisation qui en dĂ©coule. A. Parcs Naturels paysage sauvage vs paysage cultivĂ© Document n° 12 Myriam Dao, DegrĂ©s I et II, sĂ©rie ElĂ©vation, 2003, tirage numĂ©rique sur toile. Myriam Dao / ADAGP. 26 Wang Q., Parcs naturels, valorisation des paysages, reconversion des territoires », confĂ©rence du ... 31SacrĂ© versus profane ? Mon travail photographique DegrĂ©s I et II » par juxtaposition d’image, pointait ce dualisme Document n° 12. Aujourd’hui, la Chine se trouve face Ă  cette dualitĂ© dans la rĂ©flexion que mĂšnent ses institutions sur la crĂ©ation de parcs naturels »,26 Ă©tudiant avec intĂ©rĂȘt deux modĂšles celui des Parcs Nationaux amĂ©ricains, qui concernent les espaces sauvages », et le modĂšle français, appliquĂ© aux espaces ruraux et peuplĂ©s. 27 Les effets sociopolitiques des migrations forcĂ©es en Chine. liĂ©es aux grands travaux hydrauliques 32- Les Parcs Nationaux amĂ©ricains, pourraient inspirer l’amĂ©nagement d’espaces sauvages inhabitĂ©s » de l’Ouest chinois. Le modĂšle amĂ©ricain porte avec lui la menace de relocalisation des quelques populations dissĂ©minĂ©es sur le territoire Ă  amĂ©nager, afin de conforter le mythe de l’espace sauvage. La crĂ©ation des Parcs nationaux amĂ©ricains furent lourds de consĂ©quence pour les populations autochtones, en particulier celle de Yellowstone, sur des Ă©tendues prĂ©tendument qualifiĂ©es de uninhabited wilderness », terres sacrĂ©es appartenant aux Cheyennes, entre autres tribus Burnham, 2000. Mais en cela, la Chine n’a nul besoin de modĂšle, ayant dĂ©jĂ  montrĂ© que les dĂ©placements de population ne sont pas un obstacle Ă  sa politique d’amĂ©nagement du territoire cf. barrage des Trois-Gorges27. 28 Site de l’Agence française de dĂ©veloppement ... 33- Le modĂšle français des PNR Parcs Naturels rĂ©gionaux est dĂ©jĂ  mis en Ɠuvre, avec l’aide de l’Agence française de dĂ©veloppement28, dans la province du Zhejiang, trĂšs dense, oĂč le Parc National de Xianju PNX est en cours d’achĂšvement, sur le modĂšle du Parc Naturel RĂ©gional des Ballons des Vosges avec lequel il a un partenariat. Créés Ă  la fin des annĂ©es soixante, les parcs français ont vocation Ă  prĂ©server tant les Ă©cosystĂšmes que des Ă©conomies locales, artisanales ou rurales Wang, 2019. Le projet PNX promet des effets pĂ©rennes Ă  travers la mise en place de processus consultatifs et participatifs au niveau du territoire et des actions de renforcement de capacitĂ©s sur les aspects de gouvernance du parc », avec pour ambition de rĂ©pliquer ce modĂšle Ă  plus large Ă©chelle. 34MĂȘme stratĂ©gie pour l’agence WHITRAP basĂ©e Ă  Shanghai et constituĂ©e d’experts internationaux et chinois patrimoine, architecture, anthropologie, droit, urbanisme, Ă©cotourisme, agronomie, sociologie, etc., qui se positionne sur les petites localitĂ©s, et affirme s’appuyer sur la connaissance du local. Dans leurs textes, tout semble bien maitrisĂ© et extrĂȘmement vertueux. 35 Aucune stratĂ©gie territoriale ne devrait ĂȘtre Ă©laborĂ©e sans la comprĂ©hension des systĂšmes territoriaux complexes en jeu et sans identification des valeurs culturelles et naturelles, tangibles et intangibles dont ces paysages sont porteurs » Pola, 2019. 36Cependant, la mise en Ɠuvre de ces principes atteste une autre rĂ©alitĂ©. V. Les compagnons pervers du dĂ©veloppement local29 A. L’écotourisme consomme plus d’électricitĂ© 37C’est un des paradoxes du dĂ©veloppement durable. Car si le tourisme de masse offre un potentiel de dĂ©veloppement en Chine, il s’accompagne d’un revers une demande en Ă©nergie exponentielle. Les investissements de l’Agence française de dĂ©veloppement pour le Parc National de Xianju, par exemple, ne seront rentabilisĂ©s que si le tourisme y affiche complet. Or, c’est bien ce modĂšle qui pourrait s’appliquer au Yunnan, dans la vallĂ©e du fleuve Rouge. Les sites ne seront prĂ©servĂ©s qu’en Ă©change d’une augmentation de la capacitĂ© d’accueil des touristes. 30 Article du Monde 2005, Les barrages hydroĂ©lectriques, flĂ©au moderne des minoritĂ©s du Yunnan chino ... 38Comme nous l’indiquions en introduction, cette province est situĂ©e presque Ă  la source de trois fleuves au dĂ©bit important. De ce fait, de nombreux barrages produisent l’hydroĂ©lectricitĂ© en abondance, Ă  tel point que Kunming, la capitale provinciale de cinq millions d’habitants, roule au tout Ă©lectrique automobiles et deux-roues. Depuis la construction de barrages hydroĂ©lectriques en amont du fleuve Rouge, on note des perturbations dans sa partie aval, comme celles que le Vietnam dĂ©plore dĂ©jĂ . Mais on peut craindre sur tout le cours du fleuve une pĂ©nurie d’eau pour irriguer les terrasses, ainsi qu’un risque d’érosion en augmentation30. 31 Minhua L. Consumption of Packaged Convenience Food among Left-behind Children in Rural China, Inte ... 39Écologie Ă  deux vitesses Les experts de la National Cultural Heritage Administration rĂ©habilitent les villages faisant partie de la Liste du Patrimoine mondial. Que va-t-il advenir des villages qui ne rĂ©pondent pas Ă  tous les critĂšres patrimoniaux et qui, Ă©chappant aux grilles d’analyse des experts, sont non Ă©ligibles Ă  une politique de dĂ©veloppement ? Le village hani dĂ©crit plus haut est un cas typique de ceux-lĂ  situĂ© Ă  moins de 10 km d’un village identifiĂ©, lui, comme de haute valeur patrimoniale », et prĂ©servĂ© comme tel, panneaux explicatifs en anglais-mandarin devant des reconstitution de lavoir, de moulin Ă  riz, d’autel du sacrifice du buffle, gestion des dĂ©chets policĂ©e il Ă©chappe Ă  la stratĂ©gie de prĂ©servation culturelle et environnementale. La prĂ©servation ne concerne ni le village ni les riziĂšres qui le nourrissent. InchangĂ©es au premier regard, les riziĂšres sont aujourd’hui polluĂ©es par l’eau qui les alimente, chargĂ©e de produits rĂ©sultant des changements de consommation des habitants. Dans les rues du village, les caniveaux, charrient les emballages de papier bonbons et autres produits packagĂ©s31 remplaçant dĂ©sormais les brochettes de tofu des marchandes locales Document n° 13. Le village est dĂ©naturĂ© par un dĂ©veloppement sauvage des nouvelles constructions, une gestion des dĂ©chets et des eaux usĂ©es dĂ©sastreuse, et tous ces points deviendraient problĂ©matiques si le village accueillait des touristes. Sans parler du dĂ©boisement problĂ©matique de la forĂȘt et l’altĂ©ration de son Ă©cosystĂšme. Document n° 13 Pollution des canaux du village hani, Yunnan, Chine, 2015. Photographie numĂ©rique de l’auteur. B. Cultiver le paysage pour le tourisme rural 32 Le travail agricole est particuliĂšrement pĂ©nible en raison de la forte dĂ©clivitĂ© du terrain, qui en ... 40La patrimonialisation des riziĂšres en terrasses de la vallĂ©e du fleuve Rouge appelle une question Chan et al., 2016. Les riziculteurs hani seront-ils condamnĂ©s, par le biais du label Patrimoine mondial de l’Unesco » Ă  cultiver le paysage, et bientĂŽt subventionnĂ©s pour entretenir un lieu touristique32 ? 41L’inscription sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco a Ă©tĂ© immĂ©diatement suivie de mesures. Ainsi, en 2013, dans le cadre de la politique de relance des villages ruraux Chinese Traditional Villages », le gouvernement chinois lance une vaste propagande, s’appuyant sur la tĂ©lĂ©vision. Le patrimoine rural est prĂ©sentĂ© ici comme un levier important de dĂ©veloppement Ă©conomique pour les gouvernements locaux et les industries du tourisme. La sĂ©rie-documentaire tĂ©lĂ©visĂ©e Nostalgia, produite par le DĂ©partement de propagande Centrale de l’administration d’état pour la presse », pour CCTV, la chaine nationale, met en scĂšne le village de Huanglingcun, dans la province du Jiangxi, entourĂ© de forĂȘts et de champs Ă©tagĂ©s en terrasses. Les reconstructions d’habitations traditionnelles font pendant Ă  la mise scĂšne paysagĂšre, et les champs cultivĂ©s en terrasses sont plantĂ©s de diffĂ©rentes semences variant suivant les saisons et l’attente esthĂ©tique des visiteurs qui peuvent les admirer depuis une passerelle surplombante. VI. Des alternatives 33 comme l’atteste le cas de l’anthropologue Yu Xiaogang devenu fervent dĂ©fenseur de l’environnement d ... 42La description du village de Huanglingcun n’est pas issue d’une dystopie, mais de l’un des effets pervers du systĂšme trĂšs vertical de dĂ©veloppement rural. Des voix critiques se font entendre Ă©manant de diffĂ©rentes sphĂšres, tant dans le milieu des sciences sociales - les anthropologues sont attentifs aux changements Ă  l’Ɠuvre dans la chine des ethnies minoritaires33, que dans celui des arts contemporains et du cinĂ©ma, tous inspirĂ©s par un retour aux sources. Elles disent l’importance du point de vue local et pĂ©riphĂ©rique, et de l’activisme dont font preuve les acteurs locaux McLaren, 2011. A. Écologie native » 43A la fin des annĂ©es 1990, un concept Ă©merge dans la littĂ©rature, puis dans le monde universitaire, celui de yuanshengtai ćŽŸç”Ÿæ€, qui peut se traduire par Ă©cologie native » ou primitive Yu L., 2018. Cette notion se trouve Ă  l’intersection des prĂ©occupations sur l’harmonie entre la nature et l’homme, la coexistence et la prĂ©servation du patrimoine, des savoirs et des arts autochtones. La notion d’écologie native » a pu ĂȘtre largement dĂ©voyĂ©e par le marketing, les mĂ©dias, aprĂšs avoir Ă©tĂ© l’apanage des Ă©lites culturelles, le risque Ă©tant une vision figĂ©e du primitif » et de l’authentique », notamment dans les politiques d’amĂ©nagement du paysage. B. Le retour Ă  la terre des artistes contemporains chinois 34 Catalogue de l’exposition, Sous la direction de PagĂ© S., BossĂ© L. et Tinari P., 2016, Bentu des a ... 35 Dao M., 2016 Retour Ă  la campagne artistes chinois Ă  la Fondation Louis Vuitton» http//vernacu ... 44En 2016, la fondation Louis Vuitton prĂ©sente l’exposition Bentu, des artistes chinois dans la turbulence des mutations »34. Bentu, æœŹćœŸběn tǔ, littĂ©ralement, ce sont les racines, au sens du retour aux origines, un terme qui a pu ĂȘtre perçu comme profondĂ©ment pĂ©joratif il y a une vingtaine d’annĂ©es, avec mĂȘme une connotation chauviniste, mais qui connaĂźt un renouveau particulier en Chine, notamment dans le champ de l’art contemporain chinois. Ce concept qui peut faire Ă©cho Ă  celui de yuanshengtai, est aujourd’hui au centre des rĂ©flexions des artistes, des critiques et des chercheurs. Les artistes revendiquent une hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© culturelle, Ă  l’inverse d’une culture imposĂ©e Ă  partir d’un centre, et tendent Ă  abolir la distance entre centre et pĂ©riphĂ©rie35. 45L’artiste Liu Xiaodong, originaire d’un village de la province du Liaoning, revient sur les lieux trente ans aprĂšs. Ses portraits Ă  l’huile sur toile s’apparentent au courant de la photographie vernaculaire, dans la forme, comme dans la dĂ©marche, par exemple lorsqu’il documente le quotidien de ses amis ouvriers et paysans dans un espace dont il a notĂ© les profondes transformations, sociales, urbaines, Ă©cologiques Document n° 14. Document n° 14 Liu Xiaodong, Bent Rib, 2010, Oil on canvas, 150 x 140 cm Liu Xiaodong ; Courtesy Lisson Gallery. 46S’inspirant de la peinture classique, Qiu Zhijie propose From Huaxia to China, un panorama composĂ© de paysages de montagnes et de riviĂšres qui traduit les mutations qui ont transformĂ© la Chine ces derniĂšres annĂ©es, sur le plan culturel, Ă©conomique, politique et spirituel cf. supra, le discours critique de Qiu Zhijie au sujet de l’exploitation de la tradition, lors d’une confĂ©rence Ă  la Fondation Louis Vuitton Document n° 15. Document n° 15 Qiu Zhijie From Huaxia to China, dĂ©tail, 2015, Courtesy the Artist and GALLERY CONTINUA. 36 “We should seek for the source of the problem, and then try to find the solution”. Translation by H ... 47Les Ɠuvres de ces artistes de gĂ©nĂ©rations diffĂ©rentes rĂ©percutent les nouvelles donnes de l’économie et de l’écologie et parmi elles, notable, la transformation des rapports ville/campagne. L’artiste Hu Xiangqian va encore plus loin dans une critique de la gouvernance centralisĂ©e, en 2013, avec son Ɠuvre vidĂ©o Speech at the Edge of the World ». On y voit l’artiste performant un discours devant une assemblĂ©e d’élĂšves alignĂ©s en rang. Venant d’une ville qu’il situe comme Ă©tant un coin de terre perdu au bout du monde, Ă  l’extrĂȘme sud de la province du Guangdong, il s’adresse aux Ă©lĂšves comme le ferait un coach pour les motiver, suivant les mĂ©thodes en management du monde des affaires, les exhortant d’un Et alors, nous trouverons les solutions Ă  ces problĂšmes36 », Ă©tant entendu que ce nous, c’est celui des personnes directement concernĂ©es, un NOUS local, et non pas le NOUS d’une centralitĂ© ou d’un monde global. Conclusion 37 Toutefois il est Ă  noter que le statut de rĂ©gion autonome » du Guangxi » offre plus d’autonomie a ... 48Pour Ă  la fois satisfaire les intĂ©rĂȘts locaux – rĂ©duction de la pauvretĂ©, maintien de la culture ancestrale et rĂ©pondre aux enjeux Ă  l’échelle d’un monde globalisĂ© – Ă©conomie touristique, l’expĂ©rience d’autres paysages ruraux amĂ©nagĂ© pour le tourisme en Chine peut ĂȘtre riche d’enseignements. Dans la rĂ©gion autonome du Guangxi, le village de Ping An prĂ©sente une problĂ©matique similaire, avec une communautĂ© de riziculteurs en terrasses irriguĂ©es de la nationalitĂ© zhuang37. En 1993 Ă  l’occasion d’une mission ethnographique avec l’AcadĂ©mie des Sciences Sociales de Nanning, j’ai pu noter les tensions existantes entre riziculteurs et acteurs d’une Ă©conomie touristique naissante. Pendant que celle-ci prenait son essor au dĂ©triment de celle de l’agriculture, la question majeure Ă©tait dĂ©jĂ  celle du maintien des terrasses cultivĂ©es comme objet touristique, avec le souci de trouver de la main d’Ɠuvre. Depuis lors, la gouvernance locale a créé des subventions pour les familles qui tirent leur seul moyen de subsistance de la terre. On peut dĂ©jĂ  tirer un bilan des premiĂšres Ă©tudes menĂ©es Kimmel, 2015. Je livre ici quelques pistes de rĂ©flexion sur le devenir des paysages et des cultures minoritaires. 49La premiĂšre piste concerne en premier lieu les habitants, premiers concernĂ©s. 50Elles viseraient Ă  assurer l’autosuffisance ou au moins la sĂ©curitĂ© alimentaire, Ă  les faire bĂ©nĂ©ficier Ă©quitablement et consĂ©quemment des retombĂ©es de l’économie touristique et des secteurs connexes comme celui de l’immobilier de loisir, en Ă©vitant la spĂ©culation sur les terres cultivables Yuen, 2014, Ă  assurer la reprĂ©sentativitĂ© des Hani dans les instances locales provinciales, municipales et villageoises, ceci pour contrebalancer l’influence idĂ©ologique du gouvernement central, Ă  inciter les acteurs du tourisme Ă  consommer local et Ă©quitable, ceci en limitant le branding » du territoire et en impliquant fortement les acteurs locaux. 51Le second volet concerne l’environnement dans son entiĂšretĂ©, montagne, forĂȘt, source, village, riziĂšres et fleuve. Il anticiperait les risques pour l’écosystĂšme en reboisant, traitant l’érosion des sols et les glissements de terrain, maitrisant la pollution de l’eau et des sols. Ensuite, il conviendrait de limiter la consommation eau, Ă©lectricitĂ©, en Ă©duquant et encourageant des pratiques moins dommageables en limitant la circulation motorisĂ©e, et encourager la diversification des cultures, en aidant au maintien des cultures vivriĂšres locales. Mais la question de fond est celle des ressources en eau, qui ne pourra ĂȘtre traitĂ©e qu’en mĂȘme temps que celle de l’énergie barrages, retenues d’eau, qui, elle, est une question d’ordre national. Le tourisme peut contribuer Ă  la protection des paysages cultivĂ©s comme cela est le cas au Japon, aux Philippines et en IndonĂ©sie. Clifford Geertz 1972, p. 84 a Ă©tudiĂ© le systĂšme d’irrigation ancestral Ă  Bali, et selon lui Une sociĂ©tĂ© Ă©tablie est le produit final d’une si longue histoire d’adaptation Ă  son environnement qu’elle a fait de cet environnement, en quelque sorte, une dimension d’elle-mĂȘme ». 52Ce que je souhaite rappeler par cette citation, c’est que, si importantes soient les mutations que les Hani traversent depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000, le fondement de leur culture demeurera en partie parce qu’elle est dĂ©jĂ  inscrite au Patrimoine mondial et qu’artistes et chercheurs continuent de la documenter. Bien qu’en 2015 les riziculteurs hani se soucient prioritairement de quitter des conditions de vie prĂ©caires, il se pourrait que dans quelques annĂ©es des jeunes gens hani trouvent un intĂ©rĂȘt Ă  l’existence d’un fonds d’archives visuelles auxquelles, modestement, j’aurais participĂ©. Chacune de mes visites Ă  la famille Ma m’a amenĂ©e Ă  voir des pans de leur culture disparaitre. Ce constat a motivĂ© mon travail d’artiste consistant majoritairement Ă  inventorier, Ă  fixer des traces, des empreintes de ce qui a existĂ©, Ă  crĂ©er de l’archive visuelle. Mon objectif premier a Ă©tĂ© de leur donner ces recueils de dessins et photographies. 53Les objets sur lesquels je travaille ne sont pas neutres, politiquement parlant. En les approfondissant, me sont apparues distinctement leurs connections avec le monde global, le partage de ressources, les enjeux d’amĂ©nagement de l’espace, ainsi que le rapport culture minoritaire / culture dominante. M’inscrivant dans une tradition française d’intellectuels et artistes engagĂ©s, j’ai choisi, en tant qu’artiste travaillant sur la colonialitĂ©, de me positionner du cĂŽtĂ© de la culture dominĂ©e et effacĂ©e, celle de la culture hani Quiroz, 2019. 54Je souhaitais donc Ă©galement pointer le risque de voir une culture minoritaire disparaitre, remplacĂ©e par les standards de vie de la culture dominante Han, que ce soit dans la langue, l’éducation, l’architecture, l’environnement et le paysage. Il reste, selon moi, un autre modĂšle de dĂ©veloppement Ă  inventer dans les dĂ©cennies Ă  venir. 55L’artiste est un lanceur d’alerte, rĂŽle dont les artistes chinois que j’ai citĂ©s se sont saisi pour pointer les piĂšges du branding, ou folklorisation de la tradition, tant pour la culture matĂ©rielle qu’immatĂ©rielle. Ce papier se veut donc une illustration des questions que les artistes contemporains – dans la mouvance de l’artiste en ethnographe » identifiĂ©e par Hal Foster, peuvent soulever et rendre visibles, et, Ă  partir de lĂ , ce papier tente de faire bouger les lignes entre acadĂ©mie et sphĂšre artistique, confĂ©rant un statut autre Ă  l’image, celui d’un manifeste. Topo da pĂĄgina Bibliografia AugĂ©, M. 1997, La Guerre des rĂȘves. Exercices d’ethno-fiction, Le Seuil, Paris. BĂĄi, Y. 2013, ć“ˆć°Œæ—æœé„°æ–‡ćŒ–äž­çš„ćŽ†ćČèź°ćż† 仄äș‘ć—çœç»żæ˜„掿"çȘæ‹–ćžƒçŽ›"äžș䟋, äș‘ć—äșș民ć‡ș版瀟. Berque, A. 1994, DirigĂ© par, Cinq propositions pour une thĂ©orie du paysage. Pays Paysage, Champ Vallon, Paris. Berque, A. 1995, rĂ©ed. 1998, Les Raisons du paysage. De la Chine antique aux environnements de synthĂšse, Hazan, Paris. Bouchery, P. 1995, Les Hani, introduction Ă  l’étude d’une population tibĂ©to-birmane du Yunnan en relation avec la Chine. ThĂšse de doctorat, UniversitĂ© Paris X, Nanterre. 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Cuthbert, 1998. 2 Enwezor dĂ©finit l’exposition Documenta 11 comme “a constellation of disciplinary models that seek to explain and interrogate ongoing historical processes and radical change, spatial and temporal dynamics, as well as fields of actions and ideas, and systems of interpretation and production” Enwezor, 2002, p. 49 Platforms Five Constellations, Domains of Knowledge and Artistic Productions, Circuits of Research. 3 Dans le cadre de cet article, il s'agit d'ethnies minoritaires d'une Province appartenant Ă  la RĂ©publique populaire de Chine qui ne reconnait pas de peuples autochtones, mais la prééminence de la doctrine du centre sur celle de la pĂ©riphĂ©rie y est Ă©tablie. 4 Sur l’emploi du je, Fabiana Ex-Souza 2020 5 Le titre Riken no ken, une expression du théùtre japonais, signifie le regard Ă©loignĂ© » m’a Ă©tĂ© inspirĂ© par Claude LĂ©vi Strauss qui questionne la position de l'ethnologue LĂ©vi Strauss, 2011. Il Ă©voque la technique du dĂ©paysement comme un moyen de se placer en dedans et qui permet Ă  l’ethnologue de s’identifier au groupe dont il partage l’existence, en mĂȘme temps qu’il prend la distance lui permettant de se voir lui-mĂȘme depuis l’extĂ©rieur. Les femmes hani tenaient Ă  ce que je revĂȘte leur costume, le portrait Riken no ken est issu d’une collaboration. Le commissaire d’exposition Okwui Enwezor se rĂ©clamait de cet Ă©loignement tout en dĂ©fendant le concept d’Intense ProximitĂ© » pour la Triennale 2012 au Palais de Tokyo. Enwezor, 2012 6 “MinoritĂ© visible” signifie que, bien que française de naissance, j’ai Ă©tĂ© assignĂ©e Ă  une identitĂ© de part mon apparence supposĂ©e d’origine ethnique ». 7 Dans ethno-graphies, une conversation avec Martine Bouchier, publiĂ©e dans Afrikadaa, je cite Georges Condominas Comment peut-on ĂȘtre mĂ©tis ? Ă©crit-il, projetant de consacrer une Ă©tude ethnologique aux mĂ©tis, dont chacun est en quelque sorte une petite minoritĂ© ethnique ». Afrikadaa n°9 paru en 2015, pp. 120-127, accessible en ligne en juin 2020 8 Je rends compte en dĂ©tail de ce processus et de la fonction du dessin, mĂ©dia qui permet une interaction, dans une conversation avec Martine Bouchier ibid. 9 Traduction de Pascal Bouchery. 10 Bouchery, 2012, au sujet de la cosmogonie hani sa structure narrative prĂ©sente des affinitĂ©s avec le rĂ©cit de nature cosmogonique contenu dans le cĂ©lĂšbre Almanach de Chu de la pĂ©riode des Royaumes Combattants. » 11 Pour le lien entre la cosmogonie de la Chine antique et celle des Hani, cf. Bouchery 2010 et 2012. 12 Citation du peintre Zong Bing, IVe siĂšcle, Hurvitz L. 1970, "Tsung Ping's Comments on Landscape Painting", Artibus Asiae, Vol. 32, No. 2-3, pp. 146–156. 13 Citation de Mircea Eliade dans Le sacrĂ© et le profane, 1965. 14 Le nom de famille a Ă©tĂ© changĂ©. Mes hĂŽtes ne sont pas mes "informateurs" au sens de l'enquĂȘte ethnologique. Aussi, je ne souhaite exploiter ni leur image, ni les opinions livrĂ©es dans une sphĂšre privĂ©e. Cela aurait Ă©tĂ© fort diffĂ©rent s'ils avaient Ă©mis le souhait de participer et Ă  ce moment-lĂ , j'aurais souhaitĂ© qu'ils soient L'abandon de ma thĂšse en gĂ©ographie, ma sortie de l'universitĂ©, et le choix du statut d'artiste ont Ă©tĂ© pour moi des actes de dĂ©construction de la posture universitaire. Je suis tout Ă  fait consciente du fait que l'artiste est parfois dans une position surplombante similaire Ă  celle de l'anthropologue. Mais selon moi, ce surplomb est Ă©troitement imbriquĂ© au devenir des "matĂ©riaux" recueillis, transformĂ©s ou créés vont-ils ĂȘtre exposĂ©s, vendus, autrement dit, la culture de "l'Autre" est-elle soumise Ă  une sorte d'appropriation culturelle ? Je continue Ă  m’interroger sur ces questions complexes. 15 Ces savoirs, en particulier la trĂšs riche pharmacopĂ©e relevĂ©e par Bouchery 1999, subissent une forme d’oppression Ă©pistĂ©mique. 16 La politique de Beijing dont les deux premiĂšres phases – la construction d’un cadre institutionnel et de gouvernance pour revitaliser les zones rurales d’ici 2020, la modernisation des zones rurales et de l’agriculture d’ici 2030. 17 Les seules reprĂ©sentations de riziĂšres sont issues du TraitĂ© de 1637 Tiangong Kaiwu 怩淄開物, L’Exploitation des Ɠuvres de la nature », comportant des illustrations sous l’angle de l'agriculture et de l'artisanat. 18 19 Op. citĂ© 20 La famille Ma s’est sĂ©parĂ©e de ce bijou de cĂ©rĂ©monie, et j’en ai retrouvĂ© une photographie dans un ouvrage Ă©ditĂ© au Yunnan BĂĄi, 2013, p. 91. 21 ć°‘æ•°æ°‘æ—, shǎoshĂč mĂ­nzĂș, nationalitĂ©s minoritaires, le nombre 56 fut contestĂ© en 1953 avant d’ĂȘtre officiellement adoptĂ© en 1954, en particulier dans la Province du Yunnan oĂč 200 diffĂ©rents groupes ethniques avaient clamĂ© leur existence Mullaney, 2011. 22 Yu L., “Packaging Craftwork, Sharing Heritage Collaborative Brand Promotion in Multiethnic Southwest China”, International Conference of Asian Scolars, ICAS 11, 2019, Leiden. 23 InvitĂ© au Symposium qui s’est tenu le 12 mars 2016 en marge de l’exposition Bentu, par Philip Tinari, co-commissaire et directeur du centre d’art UCCA Ă  PĂ©kin. 24 Paysage culturel des riziĂšres en terrasse des Hani de Honghe 25 Site de l’Agence française de dĂ©veloppement 26 Wang Q., Parcs naturels, valorisation des paysages, reconversion des territoires », confĂ©rence du 15 octobre 2019, en ligne sur le site de la CitĂ© de l'architecture et du Patrimoine 27 Les effets sociopolitiques des migrations forcĂ©es en Chine. liĂ©es aux grands travaux hydrauliques L'exemple du barrage des Trois-Gorges 28 Site de l’Agence française de dĂ©veloppement 29 J’emprunte cette expression Ă  Michael Cernea, citĂ© ici 30 Article du Monde 2005, Les barrages hydroĂ©lectriques, flĂ©au moderne des minoritĂ©s du Yunnan chinois » 31 Minhua L. Consumption of Packaged Convenience Food among Left-behind Children in Rural China, International Conference of Asian Scolars, ICAS 11, 2019, Leiden. 32 Le travail agricole est particuliĂšrement pĂ©nible en raison de la forte dĂ©clivitĂ© du terrain, qui engendre des parcelles Ă©troites dont la surface est impropre Ă  la mĂ©canisation. 33 comme l’atteste le cas de l’anthropologue Yu Xiaogang devenu fervent dĂ©fenseur de l’environnement des ethnies minoritaires au sein de l’ONG Green Watershed, 34 Catalogue de l’exposition, Sous la direction de PagĂ© S., BossĂ© L. et Tinari P., 2016, Bentu des artistes chinois dans la turbulence des mutations, Les expositions, Paris, Fondation Louis Vuitton 35 Dao M., 2016 Retour Ă  la campagne artistes chinois Ă  la Fondation Louis Vuitton» Dune hauteur de 1,5 Ă  3,5 mĂštres, les superbes ours bruns peuvent peser jusqu'Ă  700 kg. Pouvant vivre jusqu'Ă  30 ans, ils courent Ă  56 km/h en moyenne. Omnivore, l'ours brun est principalement nocturne, Ă  part en AmĂ©rique du Nord. Le soir, participez Ă  un safari d'observation de ces majestueux mammifĂšres. Vous serez installĂ©s dans
Soluce de Horizon Forbidden West Panorama Horizon Forbidden West, Les Hauteurs NimbĂ©es de Brume OĂč le trouver ? PubliĂ© 01 mar 2022 Par Lloyd Nouvelle soluce de panorama et cette fois au bout de la carte de Horizon 2, avec une image dont l'emplacement est assez facile Ă  trouver, mais pour laquelle l'angle Ă  trouver pour afficher l'image est un peu plus coton. Le vidage de la carte de Horizon Forbidden West continue, cette fois avec un nouveau panorama tout au bout de l'Ouest ProhibĂ©. Il va falloir plonger et surtout bien se caler, afin de rĂ©cupĂ©rer les quelques centaines de points d'expĂ©rience en rĂ©compense de cette nouvelle activitĂ© secondaire. Creusets Horizon Forbidden West Position, walkthrough et piratage DĂ©couvrez notre guide complet des creusets de Horizon 2, avec tout ce qu'il faut savoir pour les complĂ©ter leur position, quelques indications sur les mĂ©caniques qui entourent ces temples, mais aussi et surtout des soluces complĂštes dĂ©taillant les piratages dĂ©bloquĂ©s et les combats de boss. OĂč placer l'image ? Dirigez-vous Ă  l'endroit indiquĂ© sur la carte dans la vidĂ©o en haut de l'article, puis plongez dans les eaux de San Francisco jusqu'Ă  tomber sur une grande arche de pierre, qui correspond Ă  l'image en filigrane sur votre focus. Ce n'est pas l'endroit Ă  trouver qui complique un peu cette Ă©niĂšme Ă©preuve de recherche, mais davantage la zone dans laquelle vous allez devoir caler votre radar pour afficher les lieux Ă  l'Ă©poque des anciens. RepĂ©rez une prise jaune proche du bĂątiment, de celles que Aloy peut agripper pour se propulser rapidement dans l'eau. En regardant l'arche depuis ce point, vous devriez pouvoir caler correctement l'image assez simplement. RĂ©compense Allez, on vous laisse deviner... Mais oui, tout Ă  fait 1500 points d'expĂ©rience pour la rĂ©compense Ă  la dĂ©couverte de ce nouveau panorama de l'Ouest ProhibĂ©. Tests, guides et plus si affinitĂ©s... Vous apporte son aide depuis 2012 sur vos AAA favoris. 1738 PS5 C'est le moment idĂ©al pour jouer Ă  cette exclu PlayStation ! 1012 Horizon Call of the Mountain Le titre VR qui nous a bluffĂ© lors du State of Play ! 1655 God of War, Horizon... Du lourd Ă  l'horizon chez Sony cĂŽtĂ© sĂ©ries 1844 Nintendo Switch Sports toujours au top mais bientĂŽt rattrapĂ© par un jeu de karting ! 1051 Nintendo Switch Sports au sommet des ventes mais Horizon Forbidden West rĂ©siste 2000 PS5 Une exclu Sony remonte Ă  la tĂȘte des charts ? 1800 Horizon Forbidden West Un troisiĂšme opus Ă  venir ? 1339 Zone de chasse Horizon Forbidden West Comment ça marche, rĂ©compenses 1308 Elden Ring, Horizon Forbidden West Le Yin et le Yang des open-world 1925 Elden Ring, PokĂ©mon Arceus et Horizon Forbidden West en bataille dans le top des ventes Meilleure arme pour dĂ©buter Horizon Forbidden West OĂč la trouver ? 19 fĂ©v 2022 Carte Horizon Forbidden West QuĂȘtes, chemins bloquĂ©s, voyage rapide 18 fĂ©v 2022 Chemins bloquĂ©s Horizon Forbidden West Comment les ouvrir, rĂ©compenses 18 fĂ©v 2022 Creusets Horizon Forbidden West Position, walkthrough et piratage 20 fĂ©v 2022 Monture volante Horizon Forbidden West Comment la dĂ©bloquer et l'utiliser ? 19 fĂ©v 2022 Carte Horizon Forbidden West QuĂȘtes, chemins bloquĂ©s, voyage rapide 18 fĂ©v 2022

PanoramaHorizon Forbidden West, Les Couards : OĂč le trouver ? MGG France. 0:41. Panorama Horizon Forbidden West, Les Hauteurs NimbĂ©es de Brume : OĂč le trouver ? MGG France. 0:34. Panorama Horizon Forbidden West, La Longue CĂŽte : OĂč le trouver ? MGG France. 1:18. Panorama Horizon Forbidden West, Le Bosquet de la MĂ©moire : OĂč le trouver ? MGG

CélestiaAdminMessages 213Date d'inscription 08/07/2015Localisation In snappi world avec des bébés licornesSujet Les hauteurs brumeuses. Sam 25 Juil - 1706 De grandes montagne cousines avec les montagnes enneigées, frontiÚre du sud, que l'on voit trÚs mal à cause du brouillard presque permanent. Bon rp =}
Deshauteurs d'Arveyres, à cÎté de l'église, s'offre un panorama de brume neigeuse. Blancheur à cocooner si on peut, au coin de la cheminée pour ceux qui
AĂ©roport d’Homer, sept heures du matin. Comme j’avais encore un peu de temps avant mon rendez-vous, j’ai flĂąnĂ© dans l’aĂ©roport. Le vol pour Anchorage Ă©tait affichĂ©. Mais il n’y avait pas encore beaucoup de voyageurs sur les bancs. Une Indienne, massivement obĂšse, avait le regard plongĂ© dans le vide. Quelques mĂštres plus loin, un jeune gars parlait avec un homme accompagnĂ© de ses deux fils de son travail sur le pipeline du North Slope Vous lancez une tasse de cafĂ© en l’air et le cafĂ© retombe gelĂ©. » Les deux gosses, excitĂ©s, voulaient savoir s’il y avait beaucoup d’ours lĂ -haut, des ours polaires, et s’il avait dĂ©jĂ  eu des problĂšmes avec eux Moi ? Les ours ? Des problĂšmes ? J’ai un calibre 12 avec de grosses balles. » À sept heures trente, je me suis dirigĂ© vers le hangar, oĂč je devais rencontrer Dave, le pilote. Chouette petit avion », dis-je pendant que nous nous en approchions. – Ouais. Mais je ne le vois pas sous cet angle-lĂ . Pour moi, c’est de l’argent. Je gagne ma vie avec. » Il rangea mon sac ainsi que quelques marchandises pour le bateau, puis se tourna vers moi Vous n’avez pas d’armes ? – Non. – Pas de bombe Ă  poivre ? – Pas de quoi ? – Du rĂ©pulsif Ă  ours. C’est un liquide qui contient du poivre de cayenne. Dans un aĂ©rosol qui vaporise jusqu’à dix mĂštres. Utile si jamais vous vous trouvez devant un ours mal lunĂ©. – Non, pas de bombe Ă  poivre. – Mike en aura. Pas d’autres aĂ©rosols ? – Non. – Parfait. On va voler Ă  trois mille mĂštres et les aĂ©rosols peuvent exploser. Pas une catastrophe, mais ils font un sacrĂ© chantier. Si vous avez un tĂ©lĂ©phone mobile, Ă©teignez-le. À cette hauteur-lĂ , on reçoit cinq cents messages Ă  la fois. Quelque chose comme ça, c’est ce qu’on m’a dit. Mais bon, mobile Ă©teint. – OK. – Jetez un coup d’Ɠil sur les consignes de sĂ©curitĂ©. – OK. – Allez, on monte et on se met en route. Oh, encore une petite chose. Pendant le vol je peux vous signaler de serrer votre ceinture de sĂ©curitĂ©. Elles peuvent se relĂącher. Et le vol sera peut-ĂȘtre un peu agitĂ© aujourd’hui, ça souffle fort. Quand je ferai le signe 5 avec les doigts de ma main Ă©cartĂ©s, ne me parlez pas, de toute façon je ne rĂ©pondrai pas. Ça signifie que je suis Ă  cinq minutes de l’atterrissage, et serai en train de me concentrer. C’est un avion Ă  roues, pas un hydravion. Si tout va bien, on atterrit sur le sable. » ✳Nous voilĂ  donc dans les airs au-dessus d’Homer, survolant d’abord une Ă©tendue de boue et d’algues, puis ce fut le bleu le bleu du ciel en ce lumineux matin de juin, et le bleu des vagues aux crĂȘtes blanches soulevĂ©es par le vent dans la baie de Kachemak. Je vais vous faire survoler les glaciers », avait dit Dave Haynes. Seuls le bourdonnement du moteur et cette prodigieuse beauté  Au-dessous, Rocky River, les Red Mountains et Koyuktolik Bay, ensuite direction le Katmai, en survolant Fourpeaked Glacier le glacier aux quatre pics, Swikshak River, les Shakun Islets, Cape Chiniak
 Puis, entre Cape Chiniak et Cape Nukshak, Hallo Bay, et au milieu, Ninagiak Island. Hallo Bay une plage de huit kilomĂštres et plusieurs cours d’eau – Niniagiak River, Hook Creek, Hallo Creek. Autour, des collines de trois cents mĂštres d’altitude, des montagnes de plus de mille mĂštres, et, Ă  deux mille mĂštres, luisant d’une lumiĂšre fantomatique, Devil’s Desk, la Table du Diable ». Pendant que l’avion se prĂ©parait Ă  atterrir, j’ai balayĂ© du regard la zone intertidale, la grĂšve de sable noir, les entassements de troncs d’arbres argentĂ©s, la prairie plate et marĂ©cageuse que le glacier avait quittĂ©e dans sa lente retraite, et Ă  l’arriĂšre, les bosquets de bouleaux, d’aulnes, de peupliers et de tsugas. Une derniĂšre secousse et l’avion s’arrĂȘta. Merci beaucoup. – Tout le plaisir est pour moi. » En dix minutes la marchandise fut dĂ©chargĂ©e, et le Cessna repartit. Je me suis retrouvĂ© sur la plage avec Mike Rand, un gars costaud, la trentaine, qui m’attendait assis sur un des troncs blancs. Vous voyez le bateau lĂ -bas ? On pourrait y aller maintenant. Je n’ai qu’à donner un coup de fil Ă  Larry et en quelques minutes il est lĂ  avec le canot. Mais je suppose que vous prĂ©fĂ©rez passer toute la journĂ©e dans la baie. Bien sĂ»r. – Alors allons-y. » AprĂšs avoir endossĂ© nos sacs et franchi les troncs, nous nous sommes engagĂ©s dans la prairie. ✳Fin juin au Katmai. On se reprĂ©sente habituellement les ours pĂȘchant le saumon dans les torrents et au bord des chutes d’eau, Ă©claboussant l’eau de leurs larges pattes dans un banquet rouge et argent, comme s’ils ne faisaient jamais rien d’autre dans leur vie. Mais au Katmai, Ă  cette saison de l’annĂ©e, ils s’adonnaient Ă  toutes sortes d’activitĂ©s lutte, accouplement, jeu, promenade, repos, contemplation. Le plantain maritime poussait dru, ainsi que la berce, connue ici sous son nom russe, pooshkie, les buissons qui Ă  l’automne porteraient des baies commençaient Ă  sortir leurs feuilles, des ombles frĂ©tillaient dans les ruisselets, tandis que dans un ruisseau, une harle flottait tranquillement suivie d’un chapelet de douze canetons. Si jamais il venait Ă  l’esprit d’un ours de s’en prendre Ă  ses canetons, elle lui volerait Ă  la gueule », dit Mike. Mais quel ours se donnerait ce mal quand, en plus de tout le reste, il y avait ces dĂ©licieuses palourdes Ă  dĂ©guster sur la plage ? Une dizaine de grizzlis Ă©taient alignĂ©s lĂ -bas, qui creusaient consciencieusement, en levant de temps en temps la tĂȘte pour renifler le vent. Mon contact Ă  Homer m’avait dit que Mike Rand connaissait bien les ours, leur comportement, leur psychologie. J’ai vite constatĂ© que ce n’était pas du boniment et j’ai pu apprĂ©cier ses tactiques. Gardant toujours le vent derriĂšre nous, afin que les ours puissent sentir notre prĂ©sence et ne soient pas pris par surprise, nous marchions Ă  une bonne distance d’eux en demi-cercles, ne les approchant jamais directement mais nous arrĂȘtant de temps en temps pour les laisser venir vers nous. Une imposante femelle couleur de miel avait particuliĂšrement attirĂ© notre attention. En s’approchant de nous, elle avait mĂąchonnĂ© de l’herbe, puis s’était assise, comme pour dire Je suis assise ici, d’accord ? Je ne vais pas vous attaquer. Ça va, tout est OK. Asseyez-vous aussi. » Alors nous avons posĂ© nos sacs et nous nous sommes assis. Au bout d’un moment, l’ourse se leva et se remit Ă  paĂźtre. Prenant son temps, allant de-ci de-lĂ , lentement, lentement, elle avança dans notre direction, plus prĂšs, plus prĂšs, de plus en plus prĂšs. À trois mĂštres de nous elle leva la tĂȘte, regarda les deux humains avec ses petits yeux impĂ©nĂ©trables, et passa son chemin. Vers midi, aprĂšs avoir mangĂ© les sandwichs que Larry avait prĂ©parĂ©s, nous nous sommes dirigĂ©s vers le fond de la baie et avons longĂ© une rangĂ©e d’aulnes, de saules, d’épicĂ©as et de bouleaux nains On vient vers vous, les ours, on vient vers vous. » Au crĂ©puscule, lorsque nous sommes retournĂ©s Ă  la plage – Mike avait tĂ©lĂ©phonĂ© Ă  Larry pour lui demander de venir nous chercher – nous entendĂźmes des loups hurler dans l’arriĂšre-pays, de cet Ă©trange hurlement, le plus Ă©trange de tous les cris animaux, qui vous fait courir un frisson le long du dos. ✳Le Snowbird le harfang des neiges » Ă©tait un sloop d’environ quinze mĂštres. Du pont, oĂč Ă©tait situĂ© le cockpit, on descendait un petit escalier menant Ă  une cuisine qui contenait un Ă©vier, le poĂȘle, des placards, une table et des bancs, et le cabinet de toilette. Plus loin, Ă  la proue, il y avait une minuscule cabine. C’était la mienne. Je m’y sentais Ă  l’étroit, mais quand j’ai vu les cagibis oĂč dormaient Mike et Larry, je n’ai pas fait de commentaire. Larry Johnson n’était pas le propriĂ©taire du Snowbird. Il l’avait affrĂ©tĂ© pour la saison. Je commençais Ă  penser qu’en Alaska, il Ă©tait difficile de dire qui possĂ©dait quoi. Tout circulait dans une chaĂźne subcontractuelle de subsistance hasardeuse. Larry avait fait un peu de tout, cherchant du travail Ă  droite et Ă  gauche, comme tout le monde ». Mais ce qu’il aimait par-dessus tout, c’était piloter un bateau. Ses ancĂȘtres Ă©taient scandinaves, suĂ©dois plus prĂ©cisĂ©ment, installĂ©s Ă  Bristol Bay, sur la mer de BĂ©ring oĂč ils pĂȘchaient le crabe. Tout le monde a un bateau lĂ -haut. Son grand-pĂšre, c’était aux environs de 1907, avait fait naufrage dans le brouillard sur un banc de sable, quelque part dans les Walrus Islands. Il avait dĂ» abandonner son bateau, en emportant un petit stock de pois cassĂ©s et de cornichons. Tout le restant de sa vie il avait adorĂ© les pois cassĂ©s et dĂ©testĂ© les cornichons, allez savoir pourquoi ». C’était Larry qui avait demandĂ© Ă  Mike de se joindre Ă  lui, dans cette aventure d’affrĂštement estival. Mike avait Ă©tudiĂ© la biologie Ă  l’universitĂ© de Fairbanks. Il Ă©tait de Missoula, Montana, mais Ă©tait venu en Alaska pour vivre en contact direct avec une nature sauvage. Il existait, disait-il, deux conceptions de l’Alaska la DerniĂšre FrontiĂšre, c’est-Ă -dire la derniĂšre chance de pouvoir exploiter sans entraves tout ce qui Ă©tait exploitable, et la DerniĂšre Nature, la derniĂšre Wilderness, qui impliquait la prĂ©servation, et peut-ĂȘtre, qui sait, quelque chose d’inĂ©dit. La conversation ce soir-lĂ  tourna principalement autour de la mĂ©tĂ©orologie. Beaucoup de gens ici, dit Larry, la chose Ă  quoi ils pensent le plus, c’est le temps qu’il fait. Mon pĂšre, il est obsĂ©dĂ© par le temps. Je vis Ă  moins de deux kilomĂštres de chez lui Ă  Homer. Mais il me tĂ©lĂ©phone et demande “Quel temps il fait chez toi ? Ici il neige.” “Il neige ici aussi, papa.” C’est dingue. Mais le temps est dingue ici. Il peut se gĂąter brusquement, et seulement dans un petit secteur. Les vents peuvent arriver de partout Ă  la fois. Ils s’engouffrent dans les chenaux et les fjords. Et les vagues peuvent vous jouer toutes sortes de tours. » Tout cela, c’était seulement de la conversation, pour passer le temps et permettre la communication humaine. Nous ne savions pas encore que nous en aurions bientĂŽt la confirmation. ✳Nous avons passĂ© deux autres jours semblables, au cours desquels je suivais de prĂšs chaque mouvement de Mike, en notant toutes les informations qu’il pouvait me donner sur la vie Ă  Hallo Bay, en apprenant de plus en plus de choses sur les mƓurs et les humeurs des ours, ces vieux habitants de la terre. Je me souviens d’une scĂšne en particulier. Une femelle marchait le long d’une riviĂšre dans notre direction, accompagnĂ©e de son ourson. Quand elle s’aperçut de notre prĂ©sence, elle nous observa longuement. Nous ne l’avons pas regardĂ©e directement, mais avons gardĂ© les yeux tournĂ©s vers le sol. Elle passa tout prĂšs de nous, et continua sur quelques mĂštres, puis s’arrĂȘta, se coucha, son ourson pelotonnĂ© contre elle, et ils restĂšrent lĂ , tranquillement, Ă  nous regarder. C’était comme si elle avait plus confiance en nous qu’en l’un de ses semblables, quelque vieil ours mal lunĂ© qui pourrait venir la harceler. Mieux que ça. C’était comme si elle voyait en nous une dĂ©fense contre une telle agression. Nous sommes restĂ©s un long moment, immobiles, sous ce regard placide. ✳Le soir, sur le bateau, la conversation tournait autour de divers thĂšmes, tels que l’état de l’AmĂ©rique Mike disait qu’il avait Ă©tĂ© en dehors de la boĂźte » et avait une vue plus large des choses que la plupart de ses concitoyens et l’avenir de la planĂšte. De plus en plus de rapports arrivent, dit Mike, dĂ©montrant que nous avons franchi un seuil, atteint un point critique. Cela est dĂ» principalement Ă  l’accroissement d’une seule espĂšce, et qui plus est, Ă©pouvantablement vorace. Un Ă©norme dĂ©sĂ©quilibre. À ce jour, il y a environ sept milliards d’humains sur la planĂšte, avec un taux de croissance d’environ soixante-quinze millions par an. Faites un petit calcul et qu’est-ce que vous obtenez ? – Un film d’horreur, dit Larry. – Juste, dit Mike. – Oui et alors, qu’est-ce qu’il faut faire ? demanda Larry. – RĂ©duire la population humaine, bien sĂ»r. Mais qui en prendra la responsabilitĂ© ? Tous les politiciens et les Ă©conomistes n’ont que la croissance Ă  la bouche. – L’écologie ? – Un effort louable. Mais probablement trop tard. On se laissera imperceptiblement glisser d’une petite apocalypse Ă  une autre, jusqu’à ce qu’arrive la grande. De toute façon, l’humanitĂ© prĂ©fĂšre continuer Ă  se raconter des histoires, y compris des histoires de catastrophes, comme les gosses Ă  l’école maternelle. » ✳Au cours de la troisiĂšme nuit Ă  Hallo, le vent se mit Ă  souffler, et le matin, c’était la tempĂȘte. Larry paraissait soucieux. Il Ă©tait debout depuis l’aube, Ă  Ă©couter les bulletins mĂ©tĂ©orologiques. Le temps se gĂąte. » Ça ne se prĂ©sentait pas du tout comme l’avaient dit les mĂ©tĂ©orologues. Les derniĂšres prĂ©visions annonçaient un vent de sud-ouest de 30 km/h. Maintenant c’était un vent de nord-ouest soufflant Ă  50 km/h. Pas de quoi paniquer, bien sĂ»r. Il faut seulement passer Ă  travers. Tu vas oĂč te mĂšne la mĂ©tĂ©o, plus ou moins. » Rester lĂ  oĂč nous Ă©tions – Ă  peu de distance de l’üle Ninagiak, juste en face de Hallo, s’annonçait risquĂ©, avait dit Larry. Le bateau tirait dĂ©jĂ  fort sur son ancre, et pourrait se mettre Ă  la traĂźner. La meilleure chose Ă  faire Ă©tait d’aller se rĂ©fugier dans une baie abritĂ©e. Kukak, un peu plus vers le sud, Ă©tait un petit coin tranquille, on serait bien Ă  l’abri lĂ -bas. L’ennui, c’était qu’il ne savait pas trop ce qu’il en Ă©tait dans le dĂ©troit de Shelikof, et la mer pouvait ĂȘtre forte autour du cap Nukshak On va pointer le nez dehors et voir ce qui se passe. » Ce qu’on a vu, c’était un sacrĂ© charivari. La mer Ă©tait grosse, la houle faisait rage. Nous avons d’abord mis le cap sur l’est, en plein dans la lumiĂšre aveuglante du soleil. Larry dit qu’un capitaine de sa connaissance utilisait des lunettes de soudeur contre ce type d’éblouissement. Sans doute une bonne idĂ©e. Il ne voyait absolument rien. Et ce n’était pas seulement Ă  cause des rayons du soleil, mais parce que le vieux Snowbird avait perdu ses essuie-glace. Il n’avait pas vraiment besoin de voir, le bateau Ă©tait en pilotage automatique. Mais tout de mĂȘme. Enfilant son gilet de sauvetage, il sortit prĂ©cautionneusement, essuya le pare-brise, puis revint de la mĂȘme façon Voyez ces lames lĂ -bas ? C’est lĂ  que nous Ă©tions cette nuit. Je suis bien content d’en ĂȘtre parti. On serait en bouillie Ă  cette heure-ci. Il fait meilleur ici. » Concernant les vagues, le dernier message mĂ©tĂ©o disait que dans le secteur 138, Shelikof Strait, oĂč nous nous trouvions, elles feraient quatre pieds. Elles font dĂ©jĂ  plus de quatre pieds », murmura Larry dans sa barbe. – Combien de plus ? – J’ai Ă©tĂ© charpentier. Une piĂšce de contre-plaquĂ© fait quatre pieds de large. Alors je prends ça comme mesure. Au-delĂ , je pense Ă  la hauteur d’un homme. Ces vagues lĂ -bas font six pieds. AprĂšs ça, je ne mesure plus, je m’accroche. » Alors on s’est accrochĂ©, tandis que le bateau bondissait, ruait et titubait. Sur la table du cockpit j’avais Ă©talĂ© une carte du dĂ©troit de Shelikof, et gardais un Ɠil sur elle, l’autre sur la mer. De temps en temps une baleine brisait la surface de l’eau. Pendant un moment, un banc de marsouins de Dall accompagna le bateau en bondissant furieusement le long de la proue, mais s’éloigna quand un banc d’orques fit son apparition. Un vol d’alques, toujours silencieux en mer – mais avec tout le bruit du vent et de la mer leur silence n’était pas Ă©vident – passa en trombe. Plus loin, une escadrille de sternes des AlĂ©outiennes plongeaient dans les vagues et en ressortaient, dans ce qui semblait ĂȘtre une pure jouissance, une exaltation hyperexcitĂ©e. Soudain, le pilote automatique se mit Ă  faire de curieux bruits. Ce qui avait Ă©tĂ© un bruit rassurant s’était transformĂ© en une sĂ©rie de grognements, de grincements et de gĂ©missements. Ni Larry ni moi n’avons soufflĂ© mot, nous gardions simplement les yeux rivĂ©s au tableau de bord. AprĂšs quelques minutes, le bruit rĂ©gulier reprit. C’était quoi, ça ? – Je suppose que les vagues ont lĂ©gĂšrement dĂ©traquĂ© le compas. » Larry ressentit alors le besoin d’entrer en contact radio avec le propriĂ©taire du Snowbird qui Ă©tait sur son propre bateau, le Sea-Eagle, un peu plus loin dans le dĂ©troit Sea-Eagle, Sea-Eagle. Ici le Snowbird. Sur 65. – Sea-Eagle. C’est moi. Sur 65. Comment tu t’en sors, Larry ? – OK, OK. Quel vent vous avez lĂ -bas ? – N-O 30 Ă  40. Et toi ? – PlutĂŽt bizarre. On va prendre le virage tout doux et entrer dans Kukak. – OK, bon virage. – Ouais. A bientĂŽt. » Larry raccrocha et se tourna vers moi Ça va peut-ĂȘtre secouer pas mal. EspĂ©rons que ça ira. On verra bien. Une fois sortis de ce courant de retour ça devrait ĂȘtre plus calme. » LĂ -dessus, on commença Ă  prendre le virage. Le courant de retour se prĂ©senta sous la forme de vagues de sept pieds, bleu acier, aux crĂȘtes nimbĂ©es de soleil. Si auparavant elles Ă©taient fortes, Ă  prĂ©sent elles Ă©taient fĂ©roces. Il y eut une grande tension pendant une dizaine de minutes, et puis
 nous voilĂ  passĂ©s. Direction Yugnat Rocks. Selon les cartes, je pourrais serrer un peu plus la cĂŽte. Mais quel est l’intĂ©rĂȘt ? Je prĂ©fĂšre garder une distance d’un demi-mile. – Ça me va. » Finalement, sans dĂ©boires, nous Ă©tions arrivĂ©s Ă  Kukak Bay et nous dirigions vers une petite crique, en regardant le sondeur dĂ©rouler ses chiffres au fur et Ă  mesure qu’il recevait des messages du fond 69, 98, 96, 120
 Je ne veux pas utiliser le sondeur trop longtemps. Il utilise beaucoup d’électricitĂ©. Juste le temps de s’assurer que l’ancre accroche. » L’ancre accrocha, et nous Ă©tions Ă  l’abri. Ici, autrefois, il y avait une conserverie de palourdes », dit Larry, et il se dirigea vers sa couchette. Je suis allĂ© sur le pont et me suis trouvĂ© un coin confortable. Tout Ă©tait tranquille. Et je savourais encore mieux cette tranquillitĂ©, maintenant que nous Ă©tions sortis de la tempĂȘte. Un grand pygargue Ă  tĂȘte blanche Ă©tait perchĂ© comme un totem sur un rocher. Des mouettes se prĂ©lassaient sur un tronc d’arbre flottant. Au loin, dans les buissons, j’entendais les trois notes du bruant Ă  couronne blanche, la sĂ©rie irrĂ©guliĂšre du bruant fauve chip, click, chip, stsssp
, et le long sifflement rĂ©pĂ©tĂ© du merle d’AmĂ©rique. ✳Le lendemain matin, j’ai pris le canot et suis parti explorer la baie. Le soleil voilĂ© de brume. Le bleu limpide de l’eau. Le beau plumage bigarrĂ© d’un arlequin plongeur bleu, noir, blanc, rouge brun. Des anĂ©mones jaunes sur un rocher. Des lichens dorĂ©s. Un ruisseau Ă  saumons qui serpente et ondule entre les herbes, la boue et le gravier. Un vol de sternes arctiques. Le chant haut perchĂ© du bruant des prĂ©s. Un hibou des marais assis sur une branche de peuplier d’AmĂ©rique, un Ɠil fermĂ©. Puis, au sommet d’un petit promontoire, un ours Ă  la fourrure fauve qui se rĂ©galait de cĂ©leri sauvage, l’image mĂȘme de la sĂ©rĂ©nitĂ© et de la satisfaction. Comme je passais Ă  cĂŽtĂ© d’un bosquet d’aulnes, un froissement attira mon attention, juste un lĂ©ger bruissement, rien qui ressemblĂąt au dĂ©placement d’un ours. Je me suis arrĂȘtĂ© et j’ai regardĂ© dans le massif. Rien. Puis, alors que je retournais vers le sentier, je l’ai vu, Ă  quelques pas de moi, un carcajou, Ă  la longue fourrure brune, dense, luisante, striĂ©e de jaune sur les flancs. Le carcajou, gulo borealis. Le plus insaisissable de tous les animaux. Une crĂ©ature solitaire la plus grande partie de l’annĂ©e, qu’on ne rencontre que dans les lieux les plus reculĂ©s. D’une endurance physique Ă  toute Ă©preuve. Qui peut parcourir soixante kilomĂštres par jour Ă  la recherche de nourriture, et souvent s’en passe. Qui se sent chez lui dans un secteur de cinq cents kilomĂštres carrĂ©s. Et dans un piĂšge, prĂ©fĂ©rera se couper une patte et partir mourir ailleurs plutĂŽt que de rester captif. Le carcajou me regarda, droit dans les yeux, farouche, silencieux, et bondit dans le fourrĂ©. À bord ce soir-lĂ , j’ai parlĂ© de ma rencontre Incroyable, dit Mike, la seule chose qui peut surpasser ça, c’est de rencontrer Bigfoot. » Pour ma part, je prĂ©fĂ©rais de loin un carcajou vivant Ă  n’importe quel Bigfoot lĂ©gendaire, cela va sans dire. Nous sommes restĂ©s encore un jour Ă  Kukak, juste pour ĂȘtre sĂ»rs que le gros temps Ă©tait passĂ©, puis sommes retournĂ©s Ă  Hallo, pour rĂŽder encore un moment dans ce petit paradis prĂ©caire. C’est sur la plage de Hallo, pas loin d’un ours se rĂ©galant de palourdes, que j’ai Ă©crit sur la glaise glaciaire, de ma plus belle Ă©criture, juste avant que la mer remonte, ces lignes comme une sorte d’épitaphe La route que j’ai prise la mer quelque part un banc de sable. . 399 358 361 41 55 464 485 71

panorama les hauteurs nimbees de brume